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La guerre est un trivial pursuit

La guerre est un "trivial pursuit"

Insignifiance sans doute, coïncidence aussi, je ne désirais pas vraiment confronter "la planète des singes" et les commémorations liégeoises de la grande guerre. Parti pour une simiesque séance de détente à grand renfort d'effets spéciaux et de nostalgie adolescente du roman de Pierre Boule (c'est l'auteur, entre autres ouvrages, de ce roman qui donna naissance à bien des séquelles), j'étais bien loin des questions culturelles qui (défaut d'une profession qui ne v

ous quitte jamais) me chatouillent bien souvent. Je m'en allais, joyeux, prêt à abdiquer de mon plein gré toute espèce de conscience critique pendant deux grandes heures. Mais, ayant garé comme souvent ma mobylette fleurie (d'aucun la nomme Vif Argent ou encore la fusée, l'ironie étant carburant du décalage, je l'ai moi même nommée motobilette, ce qui en accentue encore la lenteur avec une sorte de mouvement uniformément décéléré fort plaisant) loin de tout, je dû traverser la cité pour rejoindre le cinématographe qui a ma préférence. Et donc être confronté aux tentatives provinciales d'animation urbaines thématiques autour de la guerre. Bon. Soyons clair, lorsque je dis "tentative", je n'entend pas que l'objectif fut manqué. Je pose en principe que parlant de projet culturel, on est forcément dans l'essai, la tentative, la création. Tentative d'animation, donc.

La question évidente est donc la suivante : quelle est l'intention ? Parce qu'en l'occurrence, je ne suis pas arrivé à en démêler les fils. Commémorer, se souvenir ensemble, ne me semble pas suffisant. Le battage médiatique autour du centenaire suffit amplement à ce que nous commémorions joyeusement. Commémorer, à l'heure actuelle, est absolument inutile si l'on ne vise à éduquer. C'est bien d'un "plus jamais ça" qu'il s'agit. Or, des collections de voitures anciennes au trivial pursuit géant ("le plus grrrrrand du mooooonnnde" assène l'animateur de vivacité toutes les vingts secondes) en passant par les cinq ou six personnages en déguisement d'époque (quoique l'époque en question oscille un peu entre la robe de bal 1850 revue par Disney et le costume vintage très années 50), on est en droit de s'interroger sur les objectifs que poursuit l'action culturelle en question. Si encore, en lieu et place des sempiternels houilleux au visage noirci de bouchon et boteresse en sabots, nous avions eu un Jaurès revenu d'entre les morts pour nous asséner quelques mots de ses plus grands discours, si nous avions vu un Maréchal Joffre nous inciter à partir nous enrôler, ou encore un allemand défendant, terreur à l'appui, le point de vue des envahisseurs maudits... Mais non. De la nourriture d'époque (un peu plus coûteuse bien sur, commerce oblige), un écran géant pour le bal populaire du soir et, perdues, inutiles, impopulaires quelques questions que je me pose, que je vous pose. Qu'avez vous appris ce WE sur la façon dont les puissants enrôlent les faibles dans des guerres d'empires qui ne concernent que les intérêts des familles royales ? Sur les façons d'envenimer l'esprit de tout un peuple pour le pousser à offrir sa vie dans un sacrifice inutile et sanglant ? Qu'avez vous noté comme troublantes prémisses à ces monstruosités qui pourrais nous éclairer sur ce qui se déroule ici et maintenant ? La guerre 14, cet après midi, était un grand trivial pursuit. Sans recul, sans propositions, sans grille de lecture. Le plus étrange, peut être, reste que j'ai trouvé dans ma "planète des singes" bien des questions sur la nature de l'homme, sur les rapports qu'entretiennent la peur et la violence, sur la naissance des guerres... Je n'ai donc pas tout perdu. Aurais je préféré un mauvais film et une action culturelle intéressante ? Oui. Philosophiquement, je veux dire.


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