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Supporter, mon prochain...

Supporter, tu es mon prochain. Mais, supporter, que tu m'es étranger ! J'ai beau mobiliser toutes les ressources de ma tolérance, toutes les forces de ma compréhension, toutes les dimensions de ma proverbiale amabilité, je dois te l'avouer aujourd'hui : je ne te comprends pas. Mieux, si nous n'étions pas douillettement nantis d'une société qui protège les plus faibles des siens ( émoticône wink, tu me ferai un peu peur. Ton tribalisme, tes scarifications colorées, tes rites étranges assortis de hurlements bestiaux... toutes tes manifestations, de joies ou de douleurs, me semblent empreintes de brutalités, de bruits et de fureurs.

Diable sait pourtant que moi aussi, au doux temps de ma jeunesse, je fus parfois étreint d'émotions énormes à la vue de quelques spectacles dont la théâtralité n'avait rien à envier à tes parodies épiques d'un sport oublieux de ses valeurs premières. Diable m'est témoin qu'alcoolisé parfois, je chantais faux et fort les plus troublant poèmes de Léo, les plus ironiques chansons de Georges, les plus coquines versions des Frères Jacques... des textes dont j'avoue aimer, aujourd'hui encore, la puissance. Autant que tu sembles apprécier les insondables profondeurs du best off du grand Jojo. Et s'il faut aller au bout de ces aveux, il me suffit parfois d'un braséro, d'une guitare et de quelques amis pour que remontent aussitôt ces joies adolescentes et que la nuit résonne. Pourtant, il ne me viendrait pas à l'idée d'aller manifester mon plaisir au volant d'une Escort tunée ou d'une Volkswagen aux rétros chaussettés de moufles tricolores. Je ne sais pas pourquoi, mais la seule idée de promener en public les preuves et attributs de mon appartenance sectaire à la masse bêlantes des groupies me laisse froid. Pas plus je ne songerai, comme tes camarades de La Louvière, à me mettre en meute pour aller casser de l'algérien sous prétexte que des joueurs de ballons à l'autre bout du monde n'ont pas été loin de ridiculiser tes potes surpayés. Ma joie, même débordée par des émotions trop fortes, ne me poussera pas à décéder d'une chute comme feu ton collègue bruxellois. D'habitude, mon plaisir, fut-il gigantesque, ne lache pas la bonde à ma bêtise. Un vieux reste d'inhibition sans doute. Malgré tout, supporter, je n'ai pas de haine. Après tout, je comprends que ta frustration soit immense : on te donne le cirque et tu n'as pas le pain... C'est ballo, tu ne trouves pas..


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